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Atelier [FIC·ATT], 18 juin 2014, Paris - Appel à contributions

16 May 2014
catégorisé sous: événements

Chers co-enquêteurs

Nous lançons un appel à contributions en vue de notre atelier portant sur [FIC·ATT] ("fiction" et "attachement"), qui se tiendra à Sciences Po Paris (56 rue des Saints-Pères, 75007 Paris), le 18 juin 2014 (9h30-17h30).

Notre objectif à travers cet atelier est d’organiser une « rencontre diplomatique » dans le sens que l’on peut donner à ce terme à l’intérieur du cadre proposé par Bruno Latour dans son livre Enquête sur les modes d’existence. Ce livre n’est pas un livre comme les autres : il ne se veut pas seulement le résultat d’une longue recherche (solitaire ou collective), mais aussi et surtout une proposition diplomatique offerte à tous ceux que l’on peut appeler les « militants » de certains « modes d’existences », afin que les conflits de réalité qui les conduisent à déréaliser d’autres modes d’existence puissent être réglés pacifiquement, et cela dans l’horizon d’une urgence, celle de la crise écologique qui nous oblige à réfléchir concrètement à des modifications profondes de nos modes de vie dans l’avenir. Le livre fonctionne donc comme un rapport provisoire qui doit être soumis à la ratification des « militants » de ces modes. Vous trouverez sur le site de l'enquête des modes d'existence une présentation de ce projet, ainsi que dans le texte ci-joint, rédigé par Patrice Maniglier précisément sur les questions de la rencontre qui va nous occuper.

Vous êtes invités en tant que « militants » d’un de ces modes. Plus précisément, la rencontre du 18 juin portera sur deux modes d’existence, [FIC] pour « fiction » et [ATT] pour « attachement » : il s’agira d’investir les controverses qui prolifèrent autour de la question des rapports de l’art et de l’économie comme d’un terrain d’observation pour capturer ou détecter des différences entre deux modes de réalité, auxquels nous tenons également et que nous voulons pouvoir rendre compatibles, mais qui ont jusqu’à présent été décrits de telle sorte que le conflit entre les deux est inévitable. L’hypothèse est en somme que derrière les notions d’ « art » et de « économie » se trame une différence entre des modalités d’existence distinctes, qui ne recoupent pas ces domaines mais les traversent. Bruno Latour propose de les appeler, dans son livre, « fiction » ([FIC]) et « attachement » ([ATT]). (Ce dernier terme correspond plus au régime de la marchandise qu’au champ de l’économie tout entière, qui est traversé par deux autres modes d’existence « organisation » et « moralité ». Cependant, nous nous pencherons, pour les besoins de cet atelier, plus sur les questions de consommation que de production ou de distribution, donc nous serons plus concernés par ce que Latour qualifie d’attachement.) Mais les mots importent moins ici que les problèmes. Notre problème sera de savoir :

(1) si les polémiques et les embarras qui tendent les rapports de l’art et de l’économie gagnent quelque chose à être abordés comme des conflits ontologiques, c’est-à-dire des effets des mouvements de déréalisation réciproque que l’on constate entre pratiques artistiques et pratiques marchandes ;

(2) si ces conflits peuvent être apaiser lorsqu’on requalifie les existants qui sont en jeu dans les pratiques artistiques et dans les pratiques marchandes en termes, respectivement, de « fictions » et d’« attachements » (étant entendu que ces manières d’être réel ne sont pas des faits intangibles, mais des inventions historiques, celles des « Modernes »).

Il ne s’agit pas de savoir si ces termes décrivent correctement des réalités existantes, mais si elles sont acceptables par les militants de ces modes (que les participants à cette journée doivent être par hypothèse). Il ne s’agit donc pas de « mettre à l’épreuve » les thèses de Bruno Latour, mais plutôt d’installer un espace dans lequel nous nous efforcerons de saisir au plus près le contraste entre l’existence des biens de consommation et l’existence des œuvres d’art, afin de le qualifier correctement.

Pour mener à bien cette entreprise, nous proposons de travailler des cas. Saisir au plus près ce contraste signifie choisir des situations dans lesquelles il devient difficile de faire la différence entre les deux modes d’existence (autrement dit des cas où il y a controverse), mais dans lesquelles cependant il est à la fois nécessaire et possible de retrouver des différences. Par exemple, la manière dont on spécule sur des œuvres d’art, dont on les markète, voire dont on se les approprie, ne s’aligne pas sur celle des autres « marchandises ». Cette perturbation est la trace de l’existence artistique dans l’existence marchande, et la suivre au plus près permet de mieux comprendre ce qui qualifie dans leur contraste l’être des marchandises et l’être des œuvres d’art. De même, on aimerait avoir des témoignages ou des analyses sur ce qu’il y a de spécifique dans la pratique de collection par rapport à d’autres pratiques d’acquisition.

Voici une liste de thèmes sur lesquels nous aimerions pouvoir avoir des contributions (chacune de ces contribution pouvant être ou bien un témoignage, ou bien une « analyse », mais par analyse il faut comprendre ici une manière faire entendre une voix ontologiquement engagée) :

  • analyse ou témoignage de cas dans l’histoire de l’art ou dans l’art contemporain dans lesquels des artistes semblent rendre indiscernable les réalités auxquelles ils se consacrent indiscernables des réalités marchandes, mais pour aussitôt les subvertir et manifestement le contraste de manière maximale (cf. en particulier les pratiques « pop »)

  • analyse ou témoignage dans l’histoire de l’art ou l’art contemporain de pratiques artistiques qui tentent à l’inverse de se soustraire entièrement à la forme marchande (cf. certaines pratiques conceptuelles)

  • analyse ou témoignage des pratiques de collection dans leur relation problématique avec d’autres pratiques d’acquisition

  • analyse ou témoignage des pratiques de marchandisation des œuvres d’art, dans les galeries ou les salles d’enchère (les objets d’arts sont-ils des objets marketing comme les autres ?)

  • analyse ou témoignage de cas dans lesquels les militants de la marchandise font appel à des artistes pour faire exister des réalités marchandes, tout en restant conscients du contraste parfois difficile de leurs intérêts réciproques

Nous invitons les participants qui le souhaitent à proposer des contributions de 20 minutes environ sur un sujet qui nous serait soumis jusqu'au 1 juin 2014 (réponse en fin de semaine suivante). Nous invitons les participants à joindre des documents à l’avance sous quelque forme que ce soit (textuelle, visuelle, audiovisuelle, etc.).

Merci de contribuer via la plateforme dédiée à l'enquête www.modeofexistence.org/inquiry ou de nous envoyer un document et l'argumentaire (texte d’une page maximum) qui l'accompagne par email à l’adresse à patrice.maniglier@gmail.com ainsi qu’à contact@modesofexistence.com.

N’hésitez pas à relire les chapitres [FIC] et [ATT] ainsi qu’à explorer le croisement [FIC·ATT].

Note Bene : Cet atelier est proposé dans le cadre de l’Enquête sur les Modes d’Existence par l’équipe responsable du programme « Art et Valeur » du partenariat entre Paris Ouest Nanterre et l’Ecole des Beaux-Arts de Montpellier Agglomération (Patrice Maniglier, Juan Luis Gastaldi, Grégory Niel, Laetitia Delafontaine, Michel Martin).


Ce projet de recherche a reçu le soutien financier du Conseil Européen de la Recherche (ERC) en tant que programme spécifique du 7ème Programme cadre (FP7/2007-2013) / erc Grant ideas 2010 n° 269567.

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